mardi 31 décembre 2013

Bonne année




31 décembre 2013
Enfin ... cette longue année arrive à sa fin ! Mais je ne sais pas comment 2014 va commencer !
Depuis le coup d'Etat de Mars , ça a été une succession de violences , pillages , tortures et meurtres . Et la Centrafrique, déjà parmi les derniers pays dans le monde , a continué à s'enfoncer .
Et le dernier mois de Décembre a été très dur .
A Bangui on parle de mille morts seulement en Décembre avec une tension qui est montée, entre musulmans et chrétiens dans une guerre qui n'est religieuse , mais politique  et culturelle .
Ici, à Bozoum du 6 Décembre nous vivons une réalité particulièrement lourde et belle en même temps . Les attaques des anti balaka ( la plupart des simples paysans exaspérés par 9 mois de violence par les Séléka ) du 6 , 23 et 25 Décembre ont causé cinquante morts et le déplacement de nombreuses personnes qui ont fui leurs maisons pour chercher refuge dans les champs ou à la Mission ici ( il y a actuellement 3200 personnes, mais nous sommes arrivés à 6.000 ) ou à proximité de mosquées .
Réalité lourde , car il faut penser à la nourriture, l'eau, l'ordre et la sécurité des personnes.
Mais aussi belle : 14 enfants sont nés ici à la mission. Et chaque jour je fais plusieurs tours voir les  gens, et simplement  sourire et les encourager .
Bella aussi pour le travail de médiation que nous avons essayé:  aller voir les rebelles un peu partout, sur des routes impossibles, et d'essayer d'apporter un peu de rationalité et de l'humanité dans la folie qui est la guerre . Au moins une douzaine de réunions avec les rebelles antibalaka , avec une dizaine avec les  Séléka , et ce travail fait toujours ensemble avec les musulmans .
Pour l'instant , il n'y a aucun résultat ... peut-être que n'avons fait rien d'autre que de retarder un peu la catastrophe. Si les antibalaka attaquent ( et ils sont environ un millier ) ils ne feront pas la distinction entre les rebelles Séléka et les musulmans ( parce que certains ont travaillé et ont profité de la présence de Séléka ici pour Bozoum , mais beaucoup sont innocents ). Ça sera , malheureusement, un massacre !
Nous avons essayé tout. Nous sommes allés rencontrer des gens armés jusqu'aux dents ... Nous avons demandé et exigé la présence de l'armée ( ou les forces de l' Misca africaine , ou les Français de Sangaris ) , mais personne ne semble comprendre la catastrophe qui est en vue ... Je crains que les militaires n'arriveront que  pourcompter les morts , avec quelques journalistes qui diront les mêmes choses , mais APRES !
Mais il y a encore du temps ! Et puis ... Bonne année à tous ! Le temps est toujours un espace dans lequel nous voyons la puissance et la présence de Dieu le Père , et nous espérons apprendre de ce qui s'est passé , pour construire ensemble une meilleure 2014! Que Dieu nous bénisse !
 








jeudi 26 décembre 2013

étrange Noël !




 


Un Noël particulier
samedi 21 décembre 2013
Ce matin les militaires français sont partis... et il n'y a personne pour les remplacer!
Et déjà ce matin 2 Seleka ont menacé des gens avec les armes, en dehors de la base, et à 9h j'ai dû aller en ville faire libérer un jeune arrêté par les Seleka au domicile du Colonel (auquel les militaires français avaient donné ordre de quitter sa maison et rejoindre les autres éléments à la base...
Le désarmement venait de commencer... mais je ne sais pas comment vont évoluer les choses. Je crains les exactions et violences de la part de la Seleka, et par conséquent des attaques des antibalakas...
Dans l'après-midi il y a des gens qui commencent à venir à la Mission chercher refuge. Je leur dis de rester tranquilles, mais ils ont peur parce que un grand nombre de musulmans ont repris les fusils et les couteaux. Je fais un tour en ville, mais c'est assez calme.
Après je repart rencontrer un groupe d'Antibalaka, qui sont stationnés très proche de la ville. Je les invite au calme, et à se retirer un peu plus loin. La discussion est paisible, jusqu'au moment quelqu'un amène la nouvelle que les Seleka sont sortis de leur Base avec les armes, et ils sont en train de fouiller un quartier… Les esprits se réchauffent vite, et je ne sais pas s'ils vont rester longtemps sans attaquer la ville!
Les gens ont peur, et actuellement il y a déjà 200 personnes ici à la Mission.
Le départ des militaires est un problème. Commencer une opération si délicate comme le désarmement et ne pas la finir c'est très dangereux. C'était peut-être mieux ne pas la commencer!
Est-ce que d'autres militaires vont venir? Et ils resteront combien de temps? C'est la deuxième fois qu'ils arrivent et repartent, en nous laissant dans les problèmes…

dimanche 22 décembre 2013
Journée relativement calme, peut-être aussi parce que j'ai un peu de palu…
Dans l'après-midi, malgré la fièvre, je descends à pied chez le SG pour une réunion avec les colonel de la Seleka, qui arrive avec un autre "colonel" (avec des sandales "Prada"…), et cette fois-ci ils n'ont pas d'armes, sauf un pistolet.
Eux aussi sont très préoccupés, parce que les rumeurs d'une attaque des antibalaka augmentent. La plupart des musulmans et Peuls de la ville est armée… et tout peut arriver.
On décide de faire une réunion le lendemain, avec les chefs des quartiers, mais je crains que ça sera trop tard!
Déjà ce soir beaucoup de monde est arrivée se réfugier à la Mission. Qu'est ce qu'il se passera cette nuit et demain?

Lundi 23 Décembre 2013
Nuit assez tranquille, mais le nombre des gens refugiées à la Mission  continue à augmenter.
Je pars en ville pour rencontrer l'Imam et lui proposer de faire venir les femmes et les enfants ici à la Mission. Mais c'est tard, parce qu'à 10h commencent les tirs  entre les anti balaka qui essayent de prendre la ville. Les gens arrivent en courant à la Mission, et beaucoup trouvent refuge dans l'église: les tirs, pour les premières 2 heures, sont très proches de la Mission.
A 13h, 2 Seleka traversent la cour de la Mission, avec leurs armes. Je leur dit de sortir de la concession, parce qu'il n'y a que des civils.  Ils se fâchent et ils me menacent, mais à la fin ils quittent la Mission.
 Vers 16h les tirs cessent, et les gens continuent à s'installer dans les salles et les vérandas de la Mission.
La nuit sera comment? Et demain?
Mardi 24 Décembre 2013
La matinée est assez calme, mais les gens continuent d'arriver. On est à 2.700 actuellement. Vers 13h arrive un hélicoptère, qui survole la ville, et après d'autres deux qui se posent. C'est l'Armée Française qui vient s'informer de la situation. Nous avons une réunion très rapide, et ils repartent après 20 minutes.
A 16h nous célébrons la Messe de Minuit… sécurité oblige. Beaucoup de monde, et forte participation pour les chants et les danses. Un moment de joie dans ces temps difficiles!
Une mission des Nations Unies passe pour voir la situation, mais le lendemain il seront obligé de partir sans rien faire, à cause de l'insécurité.
Mercredi 25 Décembre 2013: NOEL
C'est étrange Noel cet année! A 5h 30 il y a beaucoup de tirs qui nous réveillent. Ça continue pendant 3 heures!
J'arrive à faire partir rapidement la Mission des Nations Unies… et à 8h 30 nous commençons la Messe, malgré des avis contraires, qui préfèreraient attendre la fin des tirs.  Mais, voilà un petit miracle de Noel: aussitôt commencée la Messe, les tirs cessent pour toute la journée!
A 12h 30 nous nous retrouvons à la table, Pères et Sœurs. Il n'y a pas grand-chose, mais j'ai reussi quand même à préparer des raviolis! S'en fout les rebelles!
ça m'a beaucoup touché de recevoir des SMS et des lettres de voeux de la part des amis musulmans: ça fait bien au coeur savoir qu'on est toujours ensemble!
L'après-midi est marqué par les chants des enfants. Des chants traditionnels et d'autres. Un, crée pour l'occasion, est magnifique: les enfants chantent: arrêtez de tuer arrêtez de massacrer
Ici quelques vidéos (très brefs) du Noel à Bozoum









samedi 21 décembre 2013

une très longe sémaine





Dimanche 15 décembre
les militaires... ne sont pas arrivés... ni les Français, ni les Camerounais de la Fomac...
J'avais beaucoup d'espoir, parce quils arrivaient au bon moment, avec les antibalaka dehors, et les Seleka coincés... mais rien.
En tout cas... on avance.

Les réfugiés ici à la Mission sont plus de 5.700.

La démarche de reconciliation continue.
les Musulmans sont en train d'organiser le désarmement, et en effet on ne voit plus beaucoup de gens avec machettes etc. en ville
Hier on a presenté l'ultimatum au colonel de la Seleka, et il devait donner une reponse à 11h, puis à 15h, et finalement vers 16h il a dit qu'il accepte la deuxième solution, c'est à dire de cantonner les hommes, et qu'ils ne sortiront pas armés dans la ville...
C'est une bonne idée... meme s'il faut tenir compte du fait que:
  1. un certains nombre des Seleka (au moins 3) ont prit la fuite pour s'en aller de bon
  2. un ou 2 elements de la Seleka aujourd'hui sont allé à l'hopital, et ils ont tapé un infirmier... pour avoir des médicaments gratuitement...
Cet après midi vers 16h je suis parti rencontrer les Anti balaka, parce qu'on avait fixé un rendez-vous aujourd'hui pour partager les informations.
Je n'avais pas beaucoup de nouvelles... parce que je n'avais pas encore la proposition choisie par le colonel, et je n'avais pas encore vu les militaires, ni français ne camérounais...
J'ai expliqué cela, j'ai insisté sur la nécessité d'avoir des militares professionnels pour le désarmement, et ils ont ben réagi (ils me semblaient moins pressé que hier, par rapport au délai de 3 jours de l'ultimatum).
La réunion de hier avec les musulmans a donné des fruits, parce qu'ils sont moins violents à leur égard...
J'ai promis de revenir demain dans l'après-midi.
demain je vais essayer d'entrer en contact avec les autres groupes d'antibalaka... et on verra.
lundi 16 décembre 2013
Le matin vers 8h30 je pars en ville, pour aller avec ceux de la Croix Rouge chercher encore un cadavre et le faire ensevelir. En revenant… j'ai la mauvaise surprise de trouver 9 Seleka armés, en tenu, se promenant en ville. Et pourtant le Colonel Yahaya avait accepté de les cantonner.
Entretemps nous retrouvons un élément dans la concession de la Mission. Je le charge sur la voiture et je l'amène dehors, et il dit qu'il était venu innocemment bla bla bla… Nous faisons une enquête, et nous avons la confirmation qu'il était venu menacé une personne et en racketter une autre…
A 11h celui que nous avons appelé le "Comité de négociation" se retrouve. Nous faisons le point de la situation et nous sommes d'accord pour appeler le Colonel pour lui reprocher son non-respect des conditions de cantonnement. Il arrive à 11h 30, et nous lui signifions notre regret pour le comportement de ses hommes, qui ne respectent pas le cantonnement, et qui continuent à faire des exactions. Il faut qu'il se rende compte de la gravité de la situation et du danger dans lequel il met toute la population en agissant ainsi.
A 16h nous partons à la réunion avec les antibalaka, et nous leur expliquons la situation, et la proposition de cantonnement, ainsi que d'autres propositions pour en finir avec les exactions, tout en attendant l'arrivée des militaires français et de la Fomac.
En rentrant de la réunion, nous allons voire le problème d'une moto confisquée par un élément de la Seleka, et nous constatons qu'au moins 7 éléments de la Seleka se promènent en ville avec tenue et armes…
C'est pas évident qu'ils aillent se cantonner et rendre les armes (d'autant plus que hier ils sont parti en cacher une partie…). Du courage!

Mardi 17 décembre
Ce matin vers 8h 30 nous (SG de la Préfecture, p.Aurelio et les 4 musulmans du comité de négociation) faisons un tour en ville pour vérifier si les Seleka sont cantonnés ou non. Nous les trouvons en réunion et nous continuons vers la sortie de la ville parce que quelqu'un nous a signalé que hier les Seleka ont mis une barrière. Les gens nous confirment que des éléments ont fait une barrière, et fait les "formalités" à quelques rares voitures. Faire les formalités signifie… escroquer de l'argent.
Mais après 2 heures, le colonel des Seleka est arrivé pour les faire partir, et certains éléments ont fui.
Vers 12h commence à se répandre la nouvelle de l'arrivée des militaires français, que nous voyons sillonner la ville avec les chars blindés. Et à 13h… les voici à la Mission. Ils sont accueillis en libérateurs!
Le capitaine me demande de lui présenter la situation, et je lui explique toute l'histoire, avec la démarche de réconciliation et pacification. Il est étonné de tout ce travail, et il se réjouit parce que c'est exactement l'objectif de sa mission.
Après une visite pour identifier le site pour les installer, vers 15 nous prenons la route avec lui , et nous arrivons au lieu de la rencontre avec les antibalaka. Eux aussi sont très contents de voir les deux chars blindés, et le capitaine leur explique que son objectif est celui de faire cesser les exaction, et de désarmer tout le monde.
Les anti balaka sont très contents, et ils acceptent de déposer les armes, puisque leur objectif (désarmement des Seleka et des Musulmans et Peuls) est atteint.
Au retour à la Mission j'appelle les réfugiés à l'Eglise, et je leur donne la bonne nouvelle de la PAIX. J'explique toute la démarche, et j'explique le travail de la Mission Militaire Française. Je dis que les exactions des Seleka C'EST FINI, et que s'il se passe quelque chose, ils doivent le signaler et dénoncer rapidement. Je donne des conseils, et je demande aux gens de patienter et de parti demain matin. Nous terminons la réunion avec un grand GLORIA, chanté et dansé.
Ce soir il y a une ambiance très joyeuse: c'est comme si c'était Noel!

Mercredi 18 décembre
Beaucoup des refugiés viennent à la Messe, et nous prions pour la protection de ces jours, pour la paix et la réconciliation. Aussitôt après, les gens commencent à préparer les bagages et à partir: en moins de 2 heures, la Mission est vide, et la quarantaine des salles occupées par les réfugiés est non seulement vidée, mais tout est bien propre: les réfugiés ont laissé tout en ordre! Un petit miracle, et un très beau geste de reconnaissance!
Plus tard je descends en ville et je trouve les gens tranquille, le marché rouvert: la vie reprend!
Les militaires français sont en ville, avec chars et camions, bien visibles, en train de cantonner les gens de la Seleka. Je passe dans le quartier musulmans, et les gens me saluent avec joie: c'est un peu la fête aujourd'hui. Une fête encore faible, souvent dérangée par des rumeurs d'attaques, mais aussi par la crainte que les rebelles et d'autres cachent des armes ailleurs… Pour ces 2 raisons, je dois descendre plusieurs fois en ville.
A 15h 30 arrive un hélicoptère, avec le Général Soriano, le chef des troupes françaises. Il rencontre le petit comité de médiation, et il écoute le récit de notre travail et nos soucis, mais aussi notre satisfaction d'avoir les forces françaises à Bozoum.
Après son départ je vais à 5 km avec le Secrétaire de la Préfecture, parce que les antibalaka se sont installés et ils ont posé une barrière, pour empêcher la fuite d'armes. Nous parlons longtemps, et nous leur disons de l'enlever, et de s'éloigner, pour que les gens de Bozoum soient plus tranquilles et qu'ils n'aient pas peur. Ils acceptent volontiers.
Le désarmement avance, mais ce n'est pas si simple que ça… Ça  demande l'implication de tous!
Jeudi 19 décembre
Nuit tranquille: la première sans les réfugiés, sans bruit, coups de toux, pleures d'enfants…
L'Imam me prie de l'aider pour l'enterrement d'une femme: il a peur des antibalaka… Je demande à la Force Française, et on part ensemble pour l'enterrer. Après je passe à l'hôpital chercher un blessé et l'amener à l'aérodrome, où un avion de la Croix Rouge le prend pour le transporter à Paoua et le confier à MSF qui s'en occupera.
A 14h 30 je prends la route avec le Secrétaire General de la Préfecture pour aller au RV avec les antibalaka. Nous les trouvons tranquilles, pratiquement il n'y a plus d'armes. On discute, et les choses avancent.
En rentrant nous allons rapidement voir une route, dans laquelle nous trouvons des Peuls qui, selon les informations reçues, sont en train de cacher des armes…. En passant en ville, nous trouvons la voiture de la Seleka, et un élément est armé, ce qui ne devrait pas être.
J'arrive à la Mission, mais des gens m'appellent pour aller rencontrer les Antibalaka d'un autre groupe,  et j'y vais. Je suis content de les voir, et causer un peu avec eux, les écouter et leur donner des conseils et les inviter à la patience dans l'attente du désarmement effectif de toutes les parties.
Je peux vérifier que il y a beaucoup de rumeurs et de mensonges qui circulent (les anti balaka auraient volé des troupeaux de 800 et 700 bêtes, ils auraient attaqué une voiture) mais je peux vérifier que toutes ces nouvelles sont fausses.
Le travail avance, très lentement, mais avance.
Vendredi 20 décembre
Le matin je pars avec le SG de la Préfecture et les militaires français à Kosso, un village à 9 km de route affreuse.
Réunion avec un autre groupe de Anti balaka: écoute de leurs raisons, et explication de la démarche de pacification. Le Capitaine français présente son rôle et son travail. Les anti balaka sont des gens simples, qui expriment leur frustration face aux exactions de la Seleka.
Avant de rentrer on passe chez l'Imam, pour calmer les esprits, qui sont encore en pleine psychose et crainte d'une attaque des antibalaka. En plus, il y a des gens qui inventent des accidents, comme un jeune dont la voiture aurait été arrêtée par les antibalaka, lui aurait été frappé et ils lui auraient volé une somme d'argent (qui, drôlement, à chaque passage augmente et change!). Finalement, nous pouvons vérifier que les antibalaka ne l'ont jamais arrêté…
Dans l'après-midi une longue réunion  du comité de médiation, pour réfléchir  et inviter tout le monde au calme et à bien vérifier toutes les histoires. Pendant la réunion arrive une voiture avec 7 éléments de la Seleka, tous armés. Je les engueule, parce qu'ils ne sont pas autorisé à sortir de leur base avec les armes. Je prends quelque photo, et ils ne sont pas contents…
Des cachettes d'armes commencent à être découvertes, mais il y a encore du travail à faire!
Samedi 21 décembre
Les militaires Français partent! Ils devraient être remplacés par les camerounais, mais quand? Ce matin il y a déjà les Seleka qui recommencent à faire leurs gaffes: je dois descendre en ville parce qu'ils ont arrêté un jeune, et je le fais libérer. Ça va durer jusqu'à quand?

 











samedi 14 décembre 2013

en travaillant pour la Paix et la Réconciliation







Vendredi 13 décembre
Ce matin, avant 6h, j'ai pris la route de Bocaranga pour aller à Tatale (50 km) chercher les blessés de l'attaque des anti balaka le samedi 7 decembre.
à moins de 15 km de Bozoum, je m'arrete parce que les anti balaka sont là, et ils m'attendent.
je les salue. c'est des gens des villages de la route. il y a des élèves, des jeunes, des adultes... ils sont plus de 80.
On commence à parler. ils expriment leur désespoir face aux exactions de la Seleka, et leurs malheurs depuis mars.
je leur dis que la réaction face aux exaction et le fait de se battre pour défendre leur familles et leur village c'est une bonne chose, mais qu'il ne faut pas confondre musulmans et Seleka. Les criminels ce sont les Seleka. Il y a des musulmans et des mbororos qui en ont profité, mais c'est hors question d'attaquer des civiles comme ils l'ont fait à Bozoum, en provoquant la réaction de la Seleka  (avec plus de 20 civils innocents tués) et des musulmans, qui maintenant sont tous armés.
Ils comprennenet, et je leur propose d'organiser une réunion avec le colonel de la Seleka... et ils acceptent...
Je continue la route, et dans chaque village il y a des anti balaka. à Tatale, pendant que nous ramassons les blessés, je rencontre le comité d'autodéfense, qui a réagi contre le anti balaka qui samedi ont attaqué les musulmans du village. l'ambiance et bonne, mais... les colonel Yahaya (de Bozoum) a vendu des Kalachnikov aux mbororos.. et ceci complique les choses...
nous rentrons avec une vingtaine de blessé....

je vais essayer de convaincre le colonel à venir demain, sans armes, à la réunion... espérons, et espérons que ce travail donne des fruits...

Samedi 14 décembre.
C'est le grand jour de la réunion avec les anti balaka (des simples paysans qui se sont constitués en comités d'autodéfense pour protéger leurs familles et leurs bines, exaspérés par les exactions des Seleka).
A 8h je vais en ville avec le Sécrétaire de la Préfecture, le Chef Secteur Scolaire et mes collaborateurs de Justice et Paix. Le Colonel Yahaya de la Seleka appelle son "Etat Major" et il me passe le téléphone, après avoir expliqué la question, et avoir assumé la responsabilité de la démarche, il donne son accord pour que le Colonel puisse venir, sans escorte (c'est la condition que j'ai exigé).
Entre temps j'arrive à convaincre quelques responsables musulmans (2 Imams, un chef Mbororo et le délégué des Transporteurs). J'ai du mail, mais en suite ils sont bien décidés, et très motivés (et aussi très courageux, en tenant compte que les antibalaka sont plutôt hostiles envers les Musulmans et les Mbororos, parce que certains parmi eux ont collaboré et profité de la venue des Seleka).
Au moment de partir, le colonel est déjà sur la voiture, quand un des Seleka monte avec beaucoup d'armes… On est obligé de le faire descendre, et le colonel décide de ne pas venir… (ce n'est qu'en suite que nous allons savoir que les Seleka sont partis avec leur voiture, à grande vitesse, pour nous suivre, mais ils ont eu un accident et ils ont dû rentrer. Je n'ose pas imaginer s'ils arrivaient à la réunion en vitesse et armés…).
Nous prenons la route. Arrivé dans le village… il y a une file impressionnante de gens armés… Ils sont plus de 500! Ils ont des fusils de fabrication artisanale, des machettes, des bâtons…
Nous commençons la réunion, dans laquelle nous laissons exprimer les chefs des gens armées. C'est impressionnant d'écouter leur cris de détresse et de souffrance. Ils ne peuvent voyager, ils ont des problèmes avec les éleveurs Mbororos (qui sont armés, et qui menacent beaucoup), ils ont été blessé, torturés, violé, pillé. Ils ont perdu des frères, tués par la Seleka (un a été tué et jeté dans le fleuve)…
Ils sont très déterminés, et ils lancent un ULTIMATUM de 3 jours pour que les Seleka déposent les armes et quittent Bozoum… Au cas contraire, ils veulent entré en Bozoum, et attaquer les Seleka
Et alors sera le désastre et le massacre (puisque les anti balaka mélangent Séleka et Arabes… on aurait un massacre de la population musulmane, et en réaction un massacre des chrétiens…).
Nous reconnaissons le bien fondé de leurs revendications par rapport au départ des Seleka. Nous essayons de faire comprendre que, même si certains musulmans et certains mbororos ont collaboré avec les Seleka, la plupart des musulmans et des mbororos sont innocents. Il faudra désarmer aussi les Musulmans et les Mbororos,, parce que le Colonel Yahaya a vendu des Kalachnikovs (au moins 20…).
Les Musulmans que nous avons amenés sont très sages, heureusement. Parfois depuis la foule qui est proche, il y a des cris contre les Musulmans, mais eux ils restent tranquilles. Ils prennent la parole, et d'abord ils demandent pardon pour le mal que les Musulmans ont fait, et déclarent de les aider à faire partir la Seleka, pour qu'on puisse retourner à vivre ensemble dans la paix…
Nous terminons la réunion avec comme objectif d'obtenir le désarmement et le départ des Selekas dans le délais de 3 jours… ça ne sera pas facile, mais on va essayer ensemble… Si on n'arrivera pas… que Dieu nous aide!
Le nombre des antibalaka de cette zone est surement de plus de 1.000 éléments. Il y a 2 autres grands groupes, et nous estimons le nombre total entre 2.500 et 3.000 personnes au moins.
Si on réussit à désarmer les Seleka et les faire partir, le mouvement des anti balaka est prêt à laisser les armes… ça pourrait faire tache d'huile, et faciliter la pacification du pays.
15h : réunion avec les gens qui sont venues ce matin (Secrétaire Préfecture, 5 musulmans, Père): nous sommes d'accord de lire l'ultimatum au colonel, et de lui donner 2 choix:
·         Les Seleka quittent Bozoum
·         Les Seleka, dans le cas qu'ils veuillent rester, doivent se cantonner dans un endroit, et ne pas sortir dans les rues avec les armes
Nous appelons le colonel, qui arrive. Mous lui lisons la note des anti balaka, et lui présentons nos propositions. C'est clair qu'ils ne sont pas trop content…
Nous leur demandons de prendre au sérieux la propositions, parce que actuellement les Anti Balaka sont très nombreux et plus puissants, et si les Seleka résistent, ça risque d'être un massacre pour tous…
Ils vont réfléchir, et demain 11h ils vont nous donner une réponse.