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Présentation des Philippines |
Recevoir une
invitation de la part des bandits ça n’arrive pas tous les jours.
Ce n’est pas sans
crainte que j’ai lu la lettre que le Maire de Toumi m’avait envoyé, par compte
des bandits, en juillet 2007, avec la demande d’une rencontre avec eux.
Les BANDITS : depuis plus de quatre
ans nous vivions dans la peur à cause d’eux.
Seulement dans
notre région, l’Ouham Pende, en 2006 une
enquête sur 9 mois sur un petit nombre
de villages (29), indiquait 192 attaques
dans les villages, 143 blessés, 30 morts et 27 viols, et 206 enlèvements.
Les bandits enlevaient les gens, et en particulier les enfants et les jeunes,
pour demander une rançon. Ceci a causé un nombre important de déplacés (la
ville de Bozoum est passé de 16.000 habitants à 28.000).
La plupart des
écoles étaient fermés, parce que les parents ne voulaient pas risquer de garder
dans un lieu seul beaucoup d’enfants,
qui pouvaient être la cible d’enlèvements.
En 2007 et en
2008 nous avions aidés les parents à
inscrire les enfants déplacés dans les
école de Bozoum, et nous avions ouvert
une école en ville pour les déplacés des écoles fermées.
C’est dans ce
contexte que j’ai reçu cette requête de la part des bandits. Ils voulaient
chercher une solution pour sortir de leur vie, et ils me demandaient de jouer
le rôle d’intermédiaire entre eux et le Gouvernement.
Il savaient très
bien ce que nous faisions par rapport aux déplacés. Mais aussi que je ne
cessais pas de pousser les gens à réagir, à ne pas se laisser décourager. Dans
tous les villages j’invitais les adultes à ne pas laisser que 3 ou 4 hommes
armées viennent tuer, blesser, enlever leurs enfants…
Nous avions aussi
fait des efforts pour ne pas laisser à coté les villages touchés par les
bandits, et nous avions construit des forages, des latrines etc. pour essayer
d’encourager les communautés villageoises.
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Présentation de l'Inde |
Une fois reçu
cette lettre, nous avons cherché d’y réfléchir et voir ce qu’il fallait faire.
J’ai pris contact avec des autorités, à la capitale. Et au niveau de la
Présidence il y a eu une réponse très positive.
Finalement le 31
juillet 2007 moi, un Conseiller Politique du Président, le Conseiller Militaire
et le Chef de Cabinet particulier du Président nous sommes parti de Bozoum pour
aller au rendez-vous. Nous, les 4, sur ma voiture, sans escorte et sans armes…
Avec un grand désir de chercher une solution à ce problème, mais aussi avec pas
mal de peur…
Cette première
réunion a eu lieu à Toumi, un petit village à 75 km de Bozoum (475 km de la
Capitale, Bangui).
Heureusement nous
étions une bonne équipe, avec une très bonne entente : deux
centrafricains, un français, un italien… Chacun avec son expérience et ses
capacités.
Le but de la
première réunion était de comprendre ce qui poussait les bandits à vivre ainsi,
et pourquoi ils avaient cherché des contacts pour changer de vie.
La plupart d’eux
c’était des jeunes du Tchad, mais aussi du Niger, Cameroun et Soudan. Chacun
avec son histoire, et tous avec plusieurs année de violences, vols et crimes
différents, avec des histoires de drogue et alcool, mais aussi avec des
familles…
Pour ma part,
étant un prêtre, sans préjugés politiques ou militaires, j’ai pu parler plus
librement que les autres, et leur dire que ce ils faisaient c’était très
mauvais, et que toute réponse à leurs demandes (soir de la part du Gouvernement
que de la part des ONG) ne pouvait être
accueillie que s’il cessaient toute action et tout crime.
Je pensais avoir
été un peu dur, mais j’ai vu que c’était ce qu’ils attendaient de moi.
Et en effet,
après cette réunion, les bandits ont cessé les attaques. Même s’il a fallu du
temps, parce qu’ils étaient divisés en plusieurs bandes, et pas toutes étaient
d’accord.
Au retour… nous
étions encore vivants, et plus contents qu’à l’allée… Mais surtout content
d’avoir pu parler tranquillement avec ces hommes, et aussi avec la communauté
du village.
Leur
requêtes ? C’était surtout la
possibilité de rentrer au pays, dans leur familles, sans courir le risque
d’être bloqué ou emprisonné. Ils avaient fait aussi des demandes bizarres
(argent ou autre), auxquelles nous avons dit qu’il n’était pas question.
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Réunion avec les Bandits!!! |
Nous sommes
retournés plusieurs fois pour approfondir le débat. Entre temps nous avons
cherché à tous les niveaux (UE, Ambassades, Nations Unies, ONG) d’obtenir des aides ou des conseils, mais
personne n’était prête ou capable d’y répondre. Au sein du Gouvernement les
idées non plus n’étaient claires. Nous envisagions de regrouper les bandits, de
les identifier, et de les faire retourner dans leur pays, mais avec des
conditions claires soit pour leurs Gouvernements que pour les bandits.
Au debout du mois
d’octobre, nous n’avons pas pu faire la réunion dans l’école de Toumi… parce
que l’école était occupée par les élèves… ça c’était un grand progrès :
voir les élèves (plus de 300) à l’école, voir les gens côtoyer les bandits sans
crainte… même dans les autres villages de la zone, la situation était plus
tranquille.
Cette approche a
permis souvent une bonne amélioration de la situation dans plusieurs villages,
le retour des déplacés et la reconstruction.
L’école et le
travail dans les écoles a eu un double impact :
·
d’un
côté le retour des élèves à l’école (avec tout ce qui fait partie d’une vie
« normale »)
·
d’autre
part, une école ouverte engage parents, gouvernement et rebelles à un certain
respect, qui favorise aussi le processus de paix
Finalement, en
février 2008, un événement a causé un brusque changement : d’autres bandes
de bandits ont attaqués un convois de voitures, et ont enlevé 2 médecins
centrafricains.
Le Gouvernement
n’a pas pu faire comme d’habitude (c’est-à-dire de ne rien faire), mais il a dû
intervenir avec l’armé, pour un ratissage de la zone.
A ce point, les
bandits ont préféré éviter des risques, et ils se sont éloignés. Et entretemps,
les villages ont constitué des groupes d’AUTODEFENSE, qui ont empêché le retour
des bandits.
Pour les
rebelles, l’approche a été un peu semblable. Mais aussi un peu plus compliquée,
parce qu’il avait des intérêts politiques derrière…
En 2005-2006 a
commencé aussi l’autre problème du pays : la rébellion armée.
Il s’agit de
bandes de jeunes, adultes et quelques ex-militaires, avec une certaine
connotation politique, qui se présentent en libérateurs, et qui ont commencé à
occuper certains partie du territoire, à cause aussi de la faiblesse de l’Etat
(des autorités civiles, mais aussi de l’Armée).
Parmi les
rebelles il y a des jeunes idéalistes, mais aussi des gens sans scrupules, sans
programme, si non l’envie de profiter de la situation.
Avec les
rebelles, l’approche a été similaire, même si avec quelques différences, dues
surtout à l’élément politique, qui est plus compliqué. En outre… la population
souvent était entre l’enclume et le marteau : victime à la fois des
rebelles et de l’Armée.
L’action menée
était celle de créer des occasions pour que la population civile, les autorités
de l’Etat et les rebelles puissent se rencontrer et dialoguer.
Je pense que
chaque pays a une situation différente.
Ce que je peux
dire sur ce que nous avons vécu (et que nous vivons encore en partie), c’est
que d’abord il faut CROIRE à la Paix.
C’est difficile,
mais sans espoir et sans foi dans l’homme, on s’en sort pas…
Un aspect
important c’est le fait d’être un prêtre, et de jouir ainsi d’une position
assez neutre, bien que très engagée auprès de la population. Et cela facilité
les choses, sois par rapport au hommes armées, qu’aux communautés locales et
aux autorités civiles.
Autre
point : ETRE CLAIR et francs. Ne pas promettre que ce qu’on peut
raisonnablement obtenir. Ne pas craindre de faire des remarques et de pousser
les gens à des changements.
Autre :
avoir des interlocuteurs sérieux, surtout de la part du Gouvernement. J’ai eu
beaucoup de chance à travailler avec des personnes avec un réel souci de la
population. Mais cela n’est pas toujours possible.
Autre :
travailler avec la population. En Centrafrique, malheureusement, les gens sont
trop habituées à subir. Mais quand la population comprend que c’est une affaire
à eux. Que leur fils, leurs conjoints sont en jeux, alors quelque chose peux
changer.
Dernière
leçon : certaines problèmes sont le fruit et la conséquences d’autres
problèmes. C’est inutile et stupide de penser de résoudre le problème simplement
en agissant sur le symptôme du mal. La rébellion et le banditisme ont des
causes profondes, et le travail doit être fait en profondeur et en amont, et en
particulier sur l’EDUCATION et en particulier sur la QUALITE de l’éducation dans un pays en difficulté :
un jeune n’a pas beaucoup de possibilité de trouver un travail, ou d’avoir des
activités (économiques, commerciales, agricoles…). Son futur est presque sans
espoir. C’est une des raisons de l’instabilité et du manque de sécurité. Il est
parfois plus intéressant pour un jeune devenir bandit ou rebelle, que de
fatiguer sur les champs, ou essayer de bâtir une vie professionnelle solide,
qui est difficile à cause du trop faible niveau des études…
Il devient alors
important de travailler pour l’Education. Et cela concerne tous : l’Etat, les ONG, la société civile… Il y a du travail à faire !